Ce mercredi 23 novembre à 12 h 23 min 40′ (heure locale) – 17 h 23 min 40 ‘ heure de Paris -, Yoann Richomme a franchi en première position la ligne d’arrivée à Pointe-à-Pitre de la 12e édition de La Route du Rhum – Destination Guadeloupe. Son temps de course est de 14 jours, 3 heures, 8 minutes et 40 secondes. Le skipper de Paprec Arkéa a effectué les 3 542 milles du parcours entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre à la vitesse de 10,44 nœuds sur l’orthodromie (la route directe). Il a en réalité parcouru 4005,34 milles à la vitesse moyenne de 11,81 nœuds. Il s’offre le record en Class40 de plus de 48 heures et le doublé, quatre ans après sa précédente victoire.

Une aventure express, une incroyable “remontada”, une domination sans partage et un dénouement qui marque l’histoire de la course. Yoann Richomme (Paprec Arkéa) a impressionné tout au long de cette transatlantique par sa course où rien n’a été laissé au hasard. Ce challenge-là s’est pourtant dessiné récemment, quand l’équipe et le skipper cherchaient un programme sportif pour la saison 2022 alors que l’attention du team était focalisée sur la construction de l’IMOCA. Ce sera La Route du Rhum-Destination Guadeloupe en Class40, parce que Yoann en est le tenant du titre et que le défi s’annonçait savoureux.

La “remontada” de l’Atlantique.

Reste à être à la hauteur de ses ambitions : un tenant du titre est par essence dans la short-list des favoris, surtout avec des moyens et une équipe à la hauteur de ses ambitions. Le plan Lombard a été mis à l’eau en juillet dernier mais Yoann s’était entraîné, longuement avec Corentin Douguet (Queguiner-Innoveo). Même bateau (un Lift V2-Lombard), même volonté de gagner mais partage total : jusqu’à la veille du départ, Yoann et Corentin échangeaient ensemble de la stratégie météo à venir. Le skipper de Queguiner-Innoveo, un des plus performants de la saison, prend rapidement la course à son compte. Yoann est loin derrière, la faute à un départ volé après « avoir été pris par son élan » reconnaît-il. Le skipper fait le choix d’effectuer sa pénalité de quatre heures avant le Cap Fréhel, profitant d’une zone de vent moins soutenue.

Retour en course donc avec le pied sur l’accélérateur. Le contournement de la Bretagne puis le golfe de Gascogne deviennent le théâtre d’une “remontada” à enthousiasmer ses proches et à accélérer le pouls de ses adversaires. Car Yoann remonte frénétiquement ses concurrents un par un. Puis, un dimanche soir (le 13 novembre), à une latitude proche du Cap Finisterre, il prend les commandes de la course, devant Corentin Douguet.

“Il fait une course incroyable”

La suite, des Açores aux alizés, ressemble à une bataille rangée où rien ne doit être laissé au hasard. L’inconfort de ces bateaux, aussi perceptible que leurs performances, se fait toujours un peu plus fort dans les fronts et ce qu’ils induisent (mer croisée et rafales déchaînées). Derrière, ses poursuivants doivent faire face à des petits pépins qui se sont avérés pénalisants. Longtemps présent dans le trio de tête, Xavier Macaire (Groupe SNEF) doit composer avec des voies d’eau. Corentin Douguet, lui, doit démonter intégralement son moteur. « Mon moteur m’a pourri mon Rhum. Il devait avoir goût de Rhum, il a goût de gasoil », confiait-il encore ce mercredi matin.

Devant, Yoann trace sa route, grappille des milles au point que son avance dépasse la barre des 120 milles. Dans sa progression, le marin double une partie de la flotte des IMOCA. Ça amuse certains sur les réseaux sociaux et ça suscite l’admiration, aussi. Guirec Soudée (Freelance.com) se dit « halluciné par sa vitesse et sa constance ». « Avec un bateau cinq mètres de moins que les nôtres, il fait une course incroyable », ajoute Tanguy Le Turquais (Lazare).

Dans le club des doubles vainqueurs.

Son avance était suffisamment conséquente pour aborder avec sérénité le tour de l’île. Il s’y était préparé, avait regardé les routages de ceux qui l’ont précédé et se souvenait de sa trace d’il y a quatre ans. Le voilà donc double vainqueur de La Route du Rhum – Destination Guadeloupe, le premier à y parvenir en Class40. Dans ce club très fermé, il y a Laurent Bourgnon, Erwan Le Roux (lauréat dans la même classe) mais aussi Roland Jourdain, Franck-Yves Escoffier et Thomas Ruyant. Mieux, Yoann bat son propre record d’il y a quatre ans de plus de 48 heures (il était de 16 jours, 3 heures, 22 minutes et 44 secondes).

Ce succès-là à valeur de rampe de lancement pour le skipper comme l’équipe qui s’est fraîchement constituée au sein de Paprec Arkéa. Le team a de l’ambition et il ne s’en cache pas, en étant composé de nombreuses personnes d’expérience issues d’autres équipes. Désormais, tous les regards et l’attention sont focalisés sur l’IMOCA, le monocoque de 60 pieds siglé Paprec Arkéa sera mis à l’eau en début d’année prochaine. En ligne de mire, il y a la fiabilisation, l’expérience à acquérir et l’objectif final : le Vendée Globe 2024.

Charlie Dalin : “Yoann a fait une course exceptionnelle !”

Charlie Dalin, qui s’est lui classé deuxième en IMOCA, n’est pas surpris de la performance de Yoann. Amis à terre, ces deux solitaires, qui ont forgé leur talent sur le circuit Figaro Bénéteau, présentent de nombreux points communs. Partenaires d’une filière d’excellence, ils partagent la même philosophie de la course au large.  « Yoann a fait une course exceptionnelle ! C’est un très grand marin, exigeant, cartésien et déterminé. Nous nous sommes mutuellement tirés vers le haut sur le circuit Figaro en tant que Skippers Macif, en trustant toutes les places d’honneur en 2016 notamment. Je sais déjà que ce sera un redoutable concurrent en IMOCA I’année prochaine. Un grand bravo à lui ! » déclare le skipper de l’IMOCA Apivia.