Nous sommes partis à la rencontre de Catherine THOMAS-PESQUEUX, une championne de course à pied qui nous partagera son parcours et ses objectifs pour les championnats de France. Découvrez sa rencontre inspirante avec Inaya Athlétisme, une équipe engagée pour une association. Lors d’une interview exclusive, elle nous livrera ses conseils pour débuter dans la course à pied et s’exprimera sur son amour pour la transmission de sa passion.

Cette année, vous avez remporté pour la deuxième fois consécutive les 5 km, en 18 minutes et les 10 km en 38 minutes de la trente-deuxième édition de la Grammoirienne. Cela vous permet d’aller aux qualifications pour les championnats de France ? Est-ce une fierté pour vous ? Avez-vous connu des difficultés ?

“Pour commencer, la trente-deuxième édition de la Grammoirienne fait partie des minimas. Les minimas, c’est la phase de qualification pour les championnats de France. Il faut clairement avoir fait une course de 5 km homologuée. Les minimas sont assez larges pour permettre au plus grand nombre de pouvoir participer aux championnats, le 22 octobre, à Saint-Omer. Pour accéder aux championnats, il faut faire, il me semble vingt-quatre minutes, aux cinq kilomètres. Comme ils veulent du monde, ils agrandissent les chronos. Cette année, je suis en Master 2, chez les femmes. Donc, forcément, plus tu vieillis, plus ils rajoutent du temps. L’idée, c’était de pouvoir valider la qualification. Mais à aucun moment, je me suis dit que je n’allais pas me qualifier. Il faut au moins avoir une course de référence. Sinon, c’est un peu pénible pour se qualifier, par la suite. Mais, dans l’ensemble, il y a beaucoup de personnes qui se qualifient. À l’heure actuelle, c’est surtout chez les femmes que c’est très accessible, chez les hommes, c’est plus compliqué. Je trouve que chez les femmes, c’est assez large, car il y en a moins qui cours et les chronos ne sont pas démesurés pour les championnats de France. Après, j’avais envie de bien faire aussi, cela faisait longtemps que je n’avais pas fait de cinq kilomètres, donc je voulais faire un chrono. Comme je savais que j’enchaînais, je serais bien passée sous la barre des dix-huit minutes, mais ce n’est qu’anecdotique. Je me dis que ce n’était pas grave, il faisait chaud et je ne me suis pas spécialement préparée pour faire un excellent résultat. Je suis contente de ce que j’ai fait, donc, il n’y a pas de problème.

Sur les cinq kilomètres, on était deux à jouer la victoire avec Isabelle RONGERE, qui est sur des formats assez courts. Nous avons essayé de courir ensemble, mais oui, pour moi, cette course était celle où il y avait le plus de concurrence, cette année. Je savais que sur les dix kilomètres, c’était “plus tranquille”, sauf inscrites de dernières minutes, bien sûr. Je n’avais pas l’optique de faire une superbe course sur cette distance. C’était pour la place et l’enchaînement des deux courses. Comme j’avais un peu d’avance sur la fin, j’ai levé un peu le pied. J’ai appris à gérer mes courses et à ne pas envoyer à toutes les épreuves. L’un des principaux buts était de participer à la fête parce que ce sont des courses familiales, très sympas et aujourd’hui, il n’y a plus de course comme celle-ci sur la route, dans le département. De plus, je voulais être présente pour les organisateurs, puisqu’ils m’avaient demandé de participer. J’étais disponible et c’était très bien.”

Ces dernières semaines, vous remportez aussi le tour de Montreuil Juigné, mais vous avez eu un peu plus de mal sur la course aux Sables-d’Olonne, comment vous êtes-vous préparée face à la chaleur ?

“En effet, ce fut un peu compliqué, mais maintenant, cela va un peu mieux. Après la compétition à Montreuil-Juigné, cela a été une course très dense avec beaucoup de concurrence et pas mal de pression. Clairement, je ne pensais pas la gagner, je pensais que cela allait être un peu plus fort devant. Cependant, on n’est pas des machines. Eva COUTANT avait déjà couru en 35’30, à Cholet. (pour rappel, Catherine THOMAS-PESQUEUX a remporté cette course en 36’24). Moi, je ne sais plus faire ces chronos en trente-cinq minutes. Donc, je pensais qu’elle allait être devant, mais comme tout le temps, la course n’est jamais jouée d’avance et chacun peut avoir ses pics de forme et de faiblesse. Elle était un peu moins dedans, ce jour-là, parce que sur le papier, maintenant, elle est meilleure que moi. Donc, là, je fais vraiment une bonne course, je suis vraiment fière de moi, puisque 36’24, c’est super dans ma catégorie d’âge. Ce sont des temps de podium. Quand j’avais fait mon podium aux championnats de France, c’étaient ces temps-là. Donc, c’est appréciable d’arriver à refaire des performances comme celles-ci.

Concernant les dix kilomètres des Sables-d’Olonne, c’est tombé quinze jours après le semi-marathon de La Loire, à Saumur. Cela faisait longtemps que je n’avais pas fait de semi-marathon, l’idée était de faire une belle course. Toute la course, j’ai eu énormément de pression, car il y avait quelqu’un derrière moi, à quinze secondes, tout le temps. Je n’ai rien lâché, mais tu sais que si tu as un coup de moins bien du premier kilomètre jusqu’au dernier avec un si petit écart, c’est compliqué. Ce sont des courses fatigantes physiquement et psychologiquement. Donc, j’avais l’opportunité d’aller aux Sables-d’Olonne et je me suis dit que c’était cohérent de faire dix kilomètres, deux semaines après un semi-marathon. Je pensais avoir récupéré. Mais, il faisait vraiment chaud et c’était une grande galère cette course. Dès les premiers kilomètres, j’ai senti que je n’avais pas de jus et tu comprends que cela va être très long.”

Quelles sont vos distances de prédilection pour les courses à pied ?

“Je pense que je ne referais plus de marathon, ça, c’est sûr, sauf pour des cas exceptionnels comme des voyages ou des associations, mais plus pour la performance. J’aurais du mal à faire toute cette préparation pour faire des temps qui seront loin de ce que j’avais l’habitude de faire. J’ai l’impression que cela sera dur d’accepter, comme c’est long et que cela demande beaucoup d’investissement. Clairement, je ne me verrais pas refaire un marathon pour faire trois heures. J’ai un record en 2h48, et ce serait dur d’accepter de faire au-dessus, donc je préfère ne plus en refaire. Après, des distances comme des cinq, dix ou vingt et un kilomètres, ce sont des préparations moins longues, cela ne me dérange pas de passer à côté. Ce n’est pas grave. Pour moi, c’est plus gérable. La préparation est aussi moins lourde et tu mets moins de temps à récupérer derrière. Il y a moins de sacrifices à faire, donc, si tu gâches ta course, il n’y a pas de regret et tu peux enchaîner par la suite. Tu rates un marathon, tu en as pour trois semaines à t’en remettre. Pour moi, ma distance de prédilection, c’est le cinq et le dix kilomètres. Pour le semi-marathon, j’espère en refaire, à la rentrée, je vais aux championnats de France, et j’espère prendre le titre. L’année prochaine, je désire faire une belle saison comme je change de catégorie, je passe en Master 3. Je souhaite remporter le plus de trophées possible. Après, c’est un objectif, on verra si j’y arrive. Si je peux faire le triplé avec le 5, 10 et le 21 km, je serai heureuse.”

Dans une précédente interview vous avez exprimé l’envie de refaire des podiums à l’international. Est-ce possible pour vous d’intégrer l’équipe de France ?

“Non, plus maintenant. J’ai eu la chance en 2015, à l’époque, il y avait une équipe de France pour les athlètes Masters de plus de trente-cinq ans. Il fallait être dans le meilleur bilan, et c’était comme pour les jeunes, il y avait des internationaux entre plusieurs nations. Malheureusement, ces dernières années, le niveau de master n’est pas valorisé, moi je le vois quand je fais des compétitions internationales. En master, tous les autres pays ont une délégation. Ils sont presque aussi bien que les jeunes, ils ont quand même la fédération qui leur paye le survêtement, ils ont comme une espèce d’unité pour eux. Si tu fais une compétition internationale, en tant que français, c’est à toi de te payer le survêtement. Il n’y a pas de volonté à porter le sport master au haut niveau, en faisant une équipe cohérente. D’ailleurs, l’équipe de France n’existe plus, il n’y en a plus. La fédération a arrêté. Après, c’est tout aussi bien de compter sur les jeunes, mais c’est toujours sympa de créer une dynamique autour de ça, c’est sympa comme exemple, même pour les plus jeunes. Il y a une petite jeune qui s’appelle CamilleRENOU qui est partie aux Etats-Unis pour préparer les JO 2024, mais pour moi, intégrer l’équipe de France, ce n’est plus possible. Je resterais devant ma télé.”

Comment se passe votre préparation avant les courses, comment sélectionnez-vous vos compétitions ?

“Avant, j’en faisais vraiment beaucoup. Maintenant, j’essaye au moins de faire une course par mois. Rien ne remplace les courses aujourd’hui, tu as beau faire les entraînements, si tu ne fais pas de course, c’est inutile. Des fois, c’est compliqué quand tu n’en fais pas assez. Donc, pour moi, je me fixe une course par mois, mais avec de gros objectifs. Puis, éventuellement, s’il y a des courses un peu plus tranquilles qui ne vont pas laisser un gros impact derrière, je vais la faire. Mais je ne vais pas en faire plus de deux par mois, pour pouvoir récupérer. Maintenant, si je ne passe pas par la case salle et musculation, je ne fais pas de trail, je fais que de la route ou des petites courses nature. J’ai pu en faire dans le passé, et je sais que c’est là que l’on a des blessures. Le trail, c’est particulier, on ne s’invente pas trailer. Ce n’est pas parce que tu es le meilleur sur route que tu vas savoir faire un trail. J’aimerais bien en refaire, mais il faut que je m’impose des séances de musculation, mais là, je n’y arrive pas encore.”

Pouvez-vous nous parler de cette rencontre avec votre association : Inaya Athlétisme ?

“Nous nous sommes rencontrés sur une course en 2021. Je suis Sarthoise d’origine, donc il m’arrivait de faire des courses dans le département. Là, j’ai rencontré Vincianne CUSSOT qui travaillait dans un club avec un projet associatif. C’était un club solidaire et sportif. Dans ma vie, j’ai toujours été sensible à cela, je trouvais le projet très intéressant. Tu as juste besoin de courir et si tu gagnes, tu soutiens une association. Tu n’as rien à faire à part courir. Ce qui fut très chouette, c’est la rencontre avec cette jeune fille, Inaya. Tu te dis que c’est très concret. Si je peux faire ma passion et en plus qu’il y a une énergie autour de tout cela, c’est intéressant et cela motive. J’ai toujours été attachée à mon club en campagne et la seule femme du groupe, sans équipe féminine. Là, il y avait une belle émulation et un niveau sportif très intéressant. On a été championne de France par équipes, sur 10 km, il y a vraiment une belle troupe féminine. Ce qui fut plaisant aussi à l’idée de rejoindre cet effectif, c’est que le projet était déjà là. Moi, je n’ai pas l’énergie d’aller chercher des sous. Ici, les mécènes sont déjà là, tout était sur un plateau. J’avais juste à dire “oui, ça m’intéresse”. Auparavant, j’avais déjà fait des actions avec une association dont je suis la marraine Handinamique. On essaye de continuer ce travail, mais cela demande de l’effort, de démarcher les partenaires, là, tout était fait, je rejoignais juste l’aventure.

Inaya, c’est le nom d’une fille qui habite à Lille. Je n’ai pas tous les détails, mais Mohamed SERBOUTI, quelqu’un qui est connu dans l’univers de la course à pied, a rencontré cette fille. Enfaîte, l’idée du club, c’est de financer des lames de carbone. Elle, elle n’a plus ses jambes, enfin, tout ce qui est en dessous des genoux. Une lame coûte environ 2 500 €, tout n’est pas remboursé et cela demande d’être changé tous les deux ans et demi, car ils grandissent. Donc, il y a une association qui s’est créée, qui est une espèce de banque de lame. Si vous voulez, même si on grandit, la lame n’est pas forcément inutilisable par la suite. Le processus avec cette compagnie est basé sur un principe simple, tu leur redonnes ton ancienne lame et ils t’en refournissent une nouvelle. Nous, notre but, c’est d’acheter plein de tailles de lame que l’on donne à l’association, afin que cela revienne moins cher aux personnes qui en ont besoin.”

Catherine Thomas-Pesqueux arbore fièrement le maillot d’Inaya en haut des podiums.

Quels sont les valeurs et les conseils que vous voudriez transmettre aux personnes qui voudraient se lancer dans le sport, mais qui se retrouvent dans la difficulté ?

“Tout d’abord, c’est de prendre du plaisir, et le reste suivra. Il faut accepter qu’au départ, tout ne soit pas facile. Mais l’important, c’est de prendre satisfaction à le faire, mais au début, forcément, il y a des étapes. Il ne faut pas vouloir commencer trop vite et se fixer des objectifs raisonnables, ce n’est pas grave si tu marches. Prenez le temps de partir tranquillement et alterner la course et la marche. Essayer d’augmenter par périodes, les temps de course, mais il ne faut pas oublier l’importance de prendre du plaisir et de se fixer des objectifs. C’est un sport qui nous apporte beaucoup comme du bien-être, de la rencontre, du lien social. Mais il ne faut jamais se décourager et ne pas paniquer si vous marchez. Il vaut mieux faire trois séances dans la semaine où l’on alterne des périodes de course et de marche en répétition et en fractionnant que de vouloir commencer trop vite, en n’y allant qu’une fois par semaine et de se dégoûter. Il n’y a pas de petit footing, du moment où l’on met les baskets, on a l’envie de faire du sport, c’est déjà gagner.”

 

“Il faut prendre son temps et ne pas paniquer si vous marchez.”

Sur les courses, vous venez souvent avec l’étiquette de favorite, n’est-ce pas compliqué pour vous ?

“Cela met toujours une forme de pression, bien évidemment. On se met la pression, car on n’a pas envie de baisser les bras et de décevoir. J’ai toujours eu la chance d’avoir eu un mental qui tenait le coup. Après, aux Sables-d’Olonne, cela m’a fait bizarre, je n’avais plus de mental. Je n’avais qu’une envie, c’était de mettre le clignotant et d’encourager les coureurs. Mais d’un côté, je suis allée au bout, je n’ai pas abandonné. J’ai quand même fait preuve de mental. Il va falloir que j’accepte, qu’un moment donné, les podiums ne seront plus là, un jour. Ils seront, en toute modestie, encore là pendant un bon moment, si je ne me blesse pas, dans ma catégorie d’âge. Logiquement, ils commencent à y avoir moins de monde qui continue à en donner autant, à mon âge. Après, c’est sympa de voir les jeunes qui prennent le relais, même si je vends chèrement ma peau, comme à Montreuil-Juigné, mais c’est normal. La plupart du temps, je me dis que cela peut être mes filles, donc, c’est ok. Si je peux en inspirer et en faire progresser quelques-unes, en disant “ouai, c’est cool, je l’ai dépassé.”, c’est super, si cela peut motiver. J’ai déjà eu un parcours que je n’aurais jamais imaginé. C’était une bonne aventure et c’est bien qu’il y ait de la relève. Aujourd’hui, il y a plein de jeunes filles très fortes, dans le Maine-et-Loire.”

Pour terminer, quels seront vos prochains objectifs ?

“Dans un premier temps, dès la rentrée, il faudra aller chercher les médailles d’or sur 5, 10 et 21 km. Enfin, de faire du mieux possible. Mais si je ne fais pas de podium, je serai déçue. Par la suite, on a un objectif club de participer aux championnats de France d’Ekiden, à côté de Marseille. C’est un marathon par équipes, on espère renouveler notre titre de championnes de France et ainsi monter le maillot Inaya sur un podium national. La problématique, c’est qu’il faut que l’on soit six en forme, il n’en faut aucune de blessées.”

Catherine THOMAS-PESQUEUX a cette envie de transmettre sa passion