Dans ce deuxième épisode, Julien ALBERT nous fera un flash-back d’une carrière réalisée en intégralité chez les Ducs d’Angers. Il aura grandi en même temps que l’évolution du club, en côtoyant des personnes comme les frères LACROIX, où des entraîneurs comme Jay VARADY et Kévin CONSTANTINE, qui auront marqué son parcours. Celui qui aura espéré jusqu’au bout, d’accrocher le titre de champion de France à son palmarès avec son club de toujours, pourra nourrir quelques regrets, à l’image des trois finales perdues en 2013. Des regrets qu’il aura à l’issue de cette saison qui se sera terminée sur un goût d’inachevé. Il nous expliquera ensuite pourquoi, il a toujours fait le choix de ne pas être accompagné d’un agent, pourquoi il a fait le choix de toujours jouer à Angers et sur le fait de n’avoir pas saisi la chance de jouer à l’étranger. Il reviendra aussi sur ses sélections en Équipe de France, même si son regret sera de n’avoir pas eu l’opportunité de disputer une compétition internationale avec les bleus. Ensuite, il nous donnera son avis sur son coach, Brennan SONNE et son évolution depuis trois saisons à la tête de l’équipe angevine. Il évoquera le hockey mineur à Angers et si le rôle d’entraîneur pouvait le tenter à l’avenir. Celui qui a été le capitaine de l’équipe durant plusieurs saisons, nous expliquera comment s’est fait le passage de témoin, avec son coéquipier, Patrick COULOMBE. Enfin, il évoquera son après-carrière, dans un nouveau rôle qui lui a été proposé par le club des Ducs.
Bonjour Julien, quel bilan sportif feriez-vous de votre carrière réalisée intégralement chez les Ducs d’Angers ?
« Bah écoutez, c’était toujours pareil, si l’on revient sur la saison, je suis frustré de terminer ma carrière de cette manière et de ne pas avoir eu l’occasion de faire mes adieux au public, de remercier les personnes que j’ai pu côtoyer, qui m’ont soutenu… Bien sûr que je me suis posé la question de prolonger ma carrière d’une saison, mais j’avais pris le temps de la réflexion durant la saison dernière. Après à chaque fois, une saison en appelle une autre, ce n’est jamais le bon moment d’arrêter. Mais le hockey, c’est un peu particulier, car avec les play-offs, on ne sait jamais quand la saison va se terminer. Malgré tout, si je relativise, je pourrais me dire que j’ai terminé ma carrière sur une victoire à Bordeaux, alors que j’aurais très bien pu la terminer sur une défaite à Rouen, en demi-finale des play-offs, sans le public angevin, sans ma famille, etc… Le hockey est une passion, mais dans quelques mois, la déception sera oubliée. Si l’on m’avait dit, lorsque j’avais dix-huit ans, que je ferais dix-sept ans de carrière professionnelle et tout cela à Angers, dans mon club de toujours, j’aurais signé tout de suite, même pour finir à la suite d’une pandémie mondiale. C’est quand même énorme. Et je pense que dans quelques années, avec encore plus de recul, je pourrais me dire que j’ai eu une belle carrière. »
Justement, avez-vous été tenté par une expérience dans un autre club français ?
« Si, bien sûr, j’ai été sollicité par quelques clubs, mais le club a commencé à prendre une autre dimension après avoir remporté la Coupe de France en 2007, au bout de ma troisième saison sous ses couleurs. Et puis, on va dire que de 2010 à 2020, le club a pratiquement été jusqu’en demi-finale des play-offs, à chaque fois, voire en finale. Et pour ma part, tout en restant humble, je ne me voyais pas signer dans un club pour gagner des titres, alors que j’étais en capacité de les gagner avec Angers. A l’inverse, si Angers avait joué le bas du tableau durant dix ans, je serais sans doute parti. Mais avec Angers, on a toujours eu l’occasion de jouer les premiers rôles et sur certaines saisons, on était un candidat pour jouer le titre, où cela est passé à rien parce que nous avons eu notre chance. Cela sera sans doute l’un des plus grands regrets de ma carrière, forcément. A côté de cela, il y a eu quelques saisons creuses, où cela a été plus compliqué, on a fait le dos rond. Si vous voulez, j’ai grandi en même temps que l’équipe, j’ai évolué en même temps que le club a évolué. Je me suis toujours posé la question, pourquoi gagner des titres avec Rouen, Grenoble ou une autre équipe, si j’en ai la possibilité avec Angers. Je vous dis cela aujourd’hui, alors qu’avec Angers, on n’a jamais été champion de France. Cela aura peut-être été un mauvais choix de carrière, mais en tout cas, je ne regrette pas d’avoir essayé avec Angers. »
Et à l’étranger ?
« C’est pareil, si cela s’était fait, cela aurait été super tôt. Car quand j’ai débuté avec Angers, je commençais à jouer au hockey, je n’avais pas que le hockey, j’avais aussi mes études à côté. C’était un peu compliqué. A un moment donné, je me suis posé la question d’une aventure en Angleterre. Je n’ai jamais fonctionné avec un agent, si j’en avais eu un, j’aurais peut-être eu une carrière différente. »
C’était un choix pour vous, de ne pas être accompagné d’un agent ?
« Alors, il y a deux façons de voir les choses. C’est sûr qu’avec l’expérience, lorsque je vois les jeunes joueurs d’aujourd’hui, qui ont du mal à se vendre, cela peut être bénéfique. En revanche, en France, le monde du hockey est un petit milieu où tout le monde se connaît, et si j’avais voulu le numéro de téléphone d’un coach, j’aurais pu me le procurer facilement. Par contre, lorsque tu veux t’exporter à l’étranger, tu as forcément moins de contact, tu n’as pas les bonnes adresses, et là, je pense que l’aide d’un agent peut être intéressant et important, afin d’être conseillé et accompagné. »
Que retiendrez-vous de votre longue carrière chez les Ducs d’Angers ?
« On va retenir les coupes et les finales de Ligue Magnus, même si elles ont été perdues, notamment en 2013. Lors de la saison 2012/2013, on domine clairement la saison régulière, avec huit points d’avance sur le deuxième, les Dragons de Rouen (45 points contre 37 points pour Rouen). Sur les vingt-six matchs (à l’époque, il n’y avait que deux matchs contre chaque équipe (aller et retour)), on en remporte vingt-et-un. Cette saison-là sera une grosse déception, car on aura disputé les trois finales de la saison et on aura perdu les trois. Clairement, on était pourtant les favoris sur les trois finales. A côté de cela, il y a aussi beaucoup de joie, comme les coupes de France gagnées. Durant ma carrière, j’ai beaucoup de souvenirs, avec beaucoup de gens, et même certains joueurs qui n’auront pas fait carrière dans le hockey. Les moments, où tu prends le plus de plaisir, c’est quand tu es un gosse, ce sont les tournois que tu fais avec ta bande de potes, quand tu as entre dix et quinze ans. La dessus, j’ai du mal à dissocier le côté professionnel et le côté amateur, car j’ai plein de souvenirs différents, mais franchement chacun de ses souvenirs sont tout aussi riche pour moi. Je me souviens autant des souvenirs dans des tournois de jeunes, que les finales à Bercy (aujourd’hui l’AccorHotels Arena). »
Et concernant l’expérience de la coupe d’Europe ?
« Si bien sûr, l’expérience européenne, était une autre dimension. Je l’ai joué en tant que capitaine. Ce fut une belle expérience, mais ce n’est pas ce que je retiendrais en premier, surtout qu’il n’y a pas eu de victoire au bout. »
Vous avez aussi été international avec l’Équipe de France ?
« Le fait de porter le maillot bleu, c’est forcément un honneur de représenter ton pays. Par contre, je n’ai jamais eu la chance d’intégrer le groupe France lors des championnats du monde. Cela sera aussi un regret, car je pense que sur certaines saisons, j’aurais pu intégrer le groupe. Des choix avaient été faits, et ces choix se sont avérés bons, puisque l’objectif du maintien dans la division était rempli, à chaque fois. C’est sûr, que lorsque j’allais en équipe de France, je me donnais à fond, tu prends du plaisir et tu prends forcément en expérience. »
Avez-vous des personnes qui ont pu vous marquer durant votre carrière sportive ?
« Il y a forcément tous les coachs que j’ai pu avoir. Durant ma carrière, si je compte aussi les assistants-coachs, j’en ai eu onze en dix-sept ans de carrière, donc il y a eu un certain turn-over. C’est aussi peut-être une chance pour moi, car s’il y avait eu un coach qui serait resté dix ans, peut-être que j’en aurais eu marre et que j’aurais été amené à aller voir ailleurs. Il y a toujours eu une nouvelle dynamique tous les deux ou trois ans. Cela te pousse à donner le meilleur de toi-même pour prouver au coach que tu as ta place dans l’équipe. Cela a été un vrai plus. Et donc pour revenir à votre question de base, oui j’ai eu des joueurs qui m’ont marqué, des gars comme les frères LACROIX, Martin et Simon, que j’ai côtoyé au début de ma carrière. Ce sont des personnes que j’ai connu en tant que joueur et en tant qu’entraîneur. Ce sont des personnes qui marquent une carrière. Et puis, ensuite, il y a eu la période avec Jay VARADY, entre 2011 et 2013, je pense qu’à partir de là, le club a pris une autre dimension, une autre façon de travailler. Il a instauré une autre méthode de professionnalisme et une autre façon de travailler qu’il n’y avait jamais eu au club. Cela a vraiment fait évoluer l’équipe. Quand je regarde sur mon chemin, un entraîneur comme Brennan SONNE est vraiment de cette école-là, pour amener l’équipe encore plus haut. »
Vous parler de l’actuel entraîneur des Ducs d’Angers, Brennan SONNE, quel est votre avis sur lui et sur son évolution ?
« Bah écoutez, il est arrivé à la tête de l’équipe, sans forcément avoir de l’expérience. Il a été recruté pour son profil. Il avait déjà travaillé avec des entraîneurs comme Jay VARADY et Kévin CONSTANTINE (entraîneur des Ducs d’Angers, durant une saison en 2010). Il était issu de cette école là. Pour avoir travaillé avec ces coachs là, j’ai pu constater qu’effectivement, c’était la même école. En revanche, il avait l’expérience en moins. C’était la première fois qu’il prenait une équipe en main. Pour faire le parallèle aussi, c’était la première fois que j’avais un coach plus jeune que moi. Donc si j’avais à donner mon avis sur lui, c’est qu’il avait moins d’expérience que les deux entraîneurs cités, mais avec les mêmes méthodes de travail. Il a fait une première saison de découverte, où il n’avait pas forcément choisi les joueurs sur le papier. Puis, on a vu que lors de sa deuxième saison, cela été mieux. On sent qu’il progresse d’année en année et je suis très content qu’il ait resigné. Je pense que c’est la meilleure des choses qui soit resté au club, avant bien sûr les futures recrues qui vont arriver. Mais continuer avec lui, qui est encore dans la bonne dynamique, c’est ce qu’il y avait de mieux pour l’équipe. »
On sent que c’est un entraîneur très travailleur et très exigeant ?
« C’est un bourreau de travail, vous sentez que c’est un passionné, il adore le hockey, il est presque 24h/24 à regarder les matchs de hockey sur son ordinateur, pour améliorer le côté tactique et pour préparer les matchs les uns après les autres. J’aurais adoré avoir un coach comme cela, dès mes premières années de hockeyeur. Lorsque Jay VARADY et Kevin CONSTANTINE sont arrivés en club, j’étais déjà en milieu de carrière, j’avais déjà sept ou huit saisons de carrière derrière moi. Quand vous voyez Brennan SONNE débarquer, vous vous dîtes qu’il y a un vrai moyen de se montrer et de progresser. J’aimerais être à la place des jeunes joueurs de cette équipe d’Angers, durant les prochaines années qui arrivent. C’est le genre de coach où tu apprends jusqu’au bout. Penser que tu n’as plus rien à apprendre, parce que c’est ta dernière année de carrière ou de contrat, ce n’est pas vrai, tu as toujours à apprendre. Et malgré sa faible expérience, il apporte d’un point de vue individuel et collectif. Cela se voit à travers les résultats qui sont de mieux en mieux. C’est le travail qui commence à payer, il n’y a pas de hasard là-dessus. »
Est-ce que cela vous tenterait de devenir coach ?
« Si j’ai eu l’occasion d’entraîner les jeunes et j’ai le diplôme pour faire cela, mais ce n’est pas dans mes objectifs sur le court ou moyen terme. »
Durant les dernières saisons, comment s’est faîte votre nomination en tant que capitaine de l’équipe ?
« C’est Simon LACROIX, qui était l’entraîneur de l’équipe, qui m’a proposé de devenir le capitaine de l’équipe, lorsque Jay VARADY est parti. J’ai accepté, car c’était un honneur pour moi. Cela n’a pas été forcément les meilleures années sportives du club, mais cela n’a pas été aussi les meilleures années d’un point de vue économique, où cela a été un peu la crise dans ce domaine-là. Durant ces années, il a fallu faire le dos rond. »
C’est vous qui avez décidé de prendre un peu de recul par rapport à ce rôle, durant les deux dernières saisons, au profit de Patrick COULOMBE ?
« C’est pareil, cela s’est fait en discussion avec le staff. J’étais content de cette décision. On sait que « Pat » est un leader naturel, il remplit parfaitement ce rôle-là. Cela était l’une de mes prérogatives, lorsque j’ai donné le « C », je ne voulais pas que cela soit n’importe qui, et j’étais content que ce soit lui. »
Et puis, vous êtes l’un des enfants du club, avec votre grand-père qui a fait partie de l’histoire du club ?
« C’est aussi pour cela que je veux rendre la pareille au club, car il m’a tout donné. J’ai commencé ici, j’ai grandi et progressé dans ce club. Toute ma vie est dans ce club. La plus part de mes amis, je les ai connus dans ce club. Il y a beaucoup de joueurs avec qui j’ai joué ici, qui sont devenus des amis. Et puis, c’est aussi une histoire familiale avec mes frères, mes parents qui sont attachés au club. Tout cela est important pour moi. Le fait d’avoir l’opportunité de travailler pour le club est juste top. Mon grand-père a été l’un des premiers présidents du club et c’est comme cela que je suis arrivé dans le monde du hockey. J’ai voulu suivre mon frère, qui a trois ans de plus que moi, dans la pratique du hockey. Mes parents se sont aussi beaucoup impliqués dans les équipes de jeunes, c’est vraiment une histoire familiale, comme je vous le dis. Pour eux, je suis content d’avoir réalisé une telle carrière, car ils ont passé beaucoup de temps dans les patinoires, à droite et à gauche, pour m’encourager. Pour le coup, cela sera l’une des grandes satisfactions de ma carrière, en ayant joué toute ma carrière à Angers, ils ont pu me suivre et ils ont pu venir à mes matchs… »
Pour conclure, pouvez-vous nous parler de votre après-carrière ?
« Je vais rejoindre le club des Ducs d’Angers, dans des missions de communication, de partenariat et marketing. Il faudra me laisser un peu de temps pour prendre mes marques petit à petit, dans ce nouveau rôle. »








